Sourcehttps://www.challenges.fr/automobile/dossiers/comprendre-le-fonctionnement-d-une-voiture-hybride_19637

Par Eric Bergerolle

Les voitures hybrides ne sont pas toutes à l’image de la Prius, la plus connue d’entre elles. Chacune exige plus ou moins d’efforts de son moteur d’assistance électrique, pour un appétit plus ou moins élevé. Tout est question de coût.

Toyota Prius (2016)

Toyota Prius (2016)

IMAGE © TOYOTA

L’hybridation consiste à combiner les atouts de la propulsion électrique avec ceux du moteur à explosion (essence ou Diesel) : silence et propreté d’un côté, puissance et autonomie de l’autre. L’idée n’a rien de nouveau et remonte au temps des pionniers de l’automobile. Mais il fallut attendre la fin des années 1990 et des avancées décisives en matière d’électronique et de stockage du courant électrique pour la rendre viable en grande série.

Les premiers à avoir cru en l’hybridation sont les constructeurs japonais Honda et Toyota qui y ont vu une phase transitoire avant l’avènement de la propulsion 100 % électrique. Laquelle bute sur la faible autonomie offerte par les accumulateurs bon marché. D’où l’idée d’embarquer un moteur à essence qui prendra le relais une fois la batterie épuisée.

Comprendre l’hybride en 8 points

L’hybride n’est pas toujours rechargeable sur le secteur

Pourquoi les constructeurs se donnent la peine de concevoir des hybrides complexes

Des hybrides pour diminuer les émissions de CO2

Ne pas se laisser abuser par le qualificatif d’hybride

Pourquoi une autonomie si faible en mode tout-électrique

Pourquoi les hybrides sont presque toutes à essence, rarement au Diesel

Pourquoi Peugeot et Citroën renoncent à l’hybride Diesel

L’hybride est-elle réellement plus écologique ?

 

L’hybride n’est pas toujours rechargeable sur le secteur

Sur les hybrides de type Toyota Prius, la batterie ne peut plus assurer à elle seule la propulsion après une poignée de kilomètres seulement ; alors que sur les hybrides dites rechargeables, telle la Volkswagen Golf GTE (qu’on branche sur le secteur), l’autonomie atteint plusieurs dizaines de kilomètres (50 km officiellement mais 30 à 40 km en réalité).

Ce distinguo entre hybride rechargeable et non-rechargeable est capital. Il détermine le prix de revient de la voiture hybride, donc son degré d’autonomie en mode tout électrique et, partant, l’usage qu’on peut espérer en faire. Une voiture hybride rechargeable pourra ainsi être autorisée à circuler dans les zones réservées aux véhicules électriques, au contraire d’une hybride non-rechargeable. Un critère d’achat important pour les citadins concernés.

 

Pourquoi les constructeurs se donnent la peine de concevoir des hybrides complexes ?

La logique paraît simple. Un petit moteur brûle moins de carburant qu’un moteur plus gros, mais génère moins de puissance. Pour effacer cet inconvénient, il est assisté dans son travail par une machine électrique qui présente l’avantage de donner sa pleine puissance dès la première rotation. Au démarrage et dans les côtes, l’électrique ajoute sa poussée à celle du moteur à essence de la même manière qu’un cycliste voit sa peine soulagée sur un vélo à assistance électrique.

L’hybridation permet non seulement de se satisfaire d’un moteur thermique plus faible, mais aussi de le faire tourner plus fréquemment à son régime de rotation optimal. Car une vitesse constante offre le meilleur rapport entre puissance et consommation de carburant.

Mais il y a mieux. Le moteur à essence peut adopter ce qu’on appelle un cycle de combustion Atkinson qui diminue encore son appétit en allongeant le temps de détente des gaz par rapport à leur compression : son fonctionnement est plus heurté à bas régimes mais cela importe peu, puisque le moteur électrique est là pour prendre le relais. Malin.

Au final, l’hybridation permet de conserver l’agrément de conduite (le client dispose d’une puissance et de reprises suffisantes) tout en réduisant la consommation et son corollaire, les émissions de dioxyde de carbone.

 

Des hybrides pour diminuer les émissions de CO2

Tous les constructeurs présents sur le marché européen se sont engagés auprès de Bruxelles à diminuer la moyenne des émissions de CO2 de leur gamme de véhicules. L’objectif est de 95 g/km à l’horizon de 2021 pour l’industrie dans son entier — plus ou moins pour chaque constructeur à titre individuel. A défaut, ces industriels s’exposent à des amendes dont le montant par voiture produite risque de dépasser les sommes investies dans les nouvelles technologies. Celles-ci vont de la dépollution du Diesel (filtres à particules, piège ou catalyseur de NOx) à la propulsion électrique en passant par l’hybridation et la miniaturisation du moteur à essence.

Ces dernières années, on a ainsi vu apparaître de petits moteurs ne comptant que deux ou trois cylindres : ce sont autant de mécaniques habilement réglées pour briller lors des tests d’homologation, beaucoup moins en conditions réelles de circulation, aux mains des clients. Cliquez pour en savoir davantage à propos des règles de calcul de la consommation et de la pollution de nos véhicules.

Ces efforts ne suffiront pas, de sorte que l’hybridation essence-électrique s’impose à tous les constructeurs européens comme un point de passage obligé. Particulièrement à BMW, à Daimler et à Audi qui doivent compenser l’appétit et les émissions de leurs grosses cylindrées. Ces modèles haut-de-gamme génèrent des marges trop rémunératrices pour y renoncer mais elles plombent leur moyenne CO2.

 

Ne pas se laisser abuser par le qualificatif d’hybride

Les constructeurs — et les vendeurs de voitures d’occasion — ont tôt fait de présenter comme « hybride » la moindre auto capable de récupérer une part de l’énergie cinétique gaspillée au freinage. Simplifions les choses et distinguons trois grandes catégories d’hybrides.

1°) Hybrides légères ou micro-hybrides

Ce qualificatif s’applique à un nombre croissant de voitures capables de faire fonctionner certains de leurs systèmes uniquement lorsque le conducteur lève le pied de l’accélérateur. Le constructeur allemand BMW fut le premier à généraliser cette approche qu’il baptise EfficientDynamics.

D’ordinaire sur une voiture conventionnelle, le moteur entraîne en continu la pompe à huile, la pompe à eau et l’alternateur (qui produit du courant) : sur les micro-hybrides, ces appareils sont supervisés par l’électronique qui interrompt leur entraînement durant l’accélération. Lorsqu’il se combine au démarreur, l’alternateur peut même donner une poussée à l’accélération pour soulager le moteur thermique.

Tous les constructeurs suivent dorénavant cette logique qui permet d’épargner temporairement une poignée de chevaux-vapeur et de diminuer d’autant la consommation de carburant. Nous parlons là de quelques décilitres mais cela suffit à grappiller de précieux grammes de CO2 durant les tests normalisés de l’homologation. De quoi maintenir un véhicule dans une tranche favorable du régime du bonus-malus écologique.

2°) Hybrides complètes

Là où la voiture micro-hybride se contente fort classiquement d’un seul moteur, l’hybride dite « complète » gagne l’assistance d’une machine électrique alimentée par une batterie spécifique. On parle alors de double-motorisation : l’électrique soulage la tâche du moteur thermique (essence ou Diesel) et charge la batterie en profitant de l’énergie cinétique au lever de pied (le moteur se mue en génératrice). L’exemple le plus connu est celui de la Toyota Prius.

D’innombrables variations existent sur ce thème, en fonction de la taille du moteur thermique, de la capacité de la batterie, comme de l’implantation de la machine électrique (en parallèle ou en série, contre la boîte de vitesses ou bien entre les roues arrière). Toutefois lorsque la batterie atteint une certaine taille, il devient souhaitable — sinon nécessaire — de la charger à l’arrêt, sur le secteur. Souhaitable parce qu’elle contient suffisamment d’énergie pour autoriser à circuler longtemps en mode tout-électrique (c’est tout bénéfice pour la consommation) ; nécessaire car la récupération d’énergie cinétique ne suffit pas à charger une aussi grande batterie.

On passe alors dans la catégorie supérieure dite des hybrides rechargeables.

3°) Hybrides rechargeables

En échange d’une rallonge de 9.000 euros, la Toyota Prius (hybride complète) voit son autonomie en mode tout-électrique passer de deux à vingt-cinq kilomètres. La différence ? La batterie au nickel-métal-hydrure (Ni-MH) cède la place sur la version rechargeable à des accumulateurs au Lithium-Ion (Li-ion) plus coûteux, à la densité énergétique supérieure. D’une capacité et d’une puissance de 1,3 kWh et 27 kW, on passe à 4,4 kWh et 38 kW.

Le conducteur d’une voiture hybride rechargeable peut fort bien s’abstenir de brancher sa voiture sur le secteur : la batterie se chargera (un peu) en roulant, au gré des ralentissements. Mais un peu seulement. Pour profiter de la pleine autonomie qu’offre une grosse batterie et économiser le supercarburant, il a tout intérêt à charger la batterie à l’arrêt.

Il faut compter 4 heures sur un prise classique, ou bien 2 heures et demi avec un chargeur à haute tension (communément appelé Wallbox) pour profiter des 50 kilomètres d’autonomie maximale promis par la Volkswagen Passat GTE. Elle et sa petite sœur la Golf GTE sont les hybrides rechargeables qui offrent en 2015 le meilleur rapport entre prix d’achat et autonomie. L’une et l’autre coûtent peu ou prou le même prix que leur équivalent Diesel GTD haut-de-gamme : leur donner plus d’autonomie signifierait un prix de vente majoré.

 

Pourquoi une autonomie si faible en mode tout-électrique

Commençons par rappeler que le moteur électrique d’une voiture hybride « simple » (type Toyota Prius) est conçu pour soulager dans sa tâche le moteur à essence. Pas pour propulser la voiture en mode tout-électrique.

La propulsion électrique pure ne devient une préoccupation des ingénieursque dans le cas des voitures hybrides dites rechargeables. Comme indiqué plus haut, les hybrides rechargeables s’encombrent d’une batterie plus volumineuse, plus lourde et plus perfectionnée afin d’emmagasiner une plus grande quantité de courant.

Où l’on comprend que l’autonomie coûte cher. Tant en termes de prix de revient que d’encombrement et de masse. Les constructeurs doivent trouver un équilibre entre leur désir de faire rouler leur voiture hybride rechargeable plus loin en mode tout-électrique et la nécessité de lui conserver un prix de vente raisonnable. De nos jours, le compromis retenu se situe autour d’une autonomie de 40 à 60 kilomètres mais les fabricants de batteries annoncent des progrès rapides.

Cet équilibre économique ne tient pas uniquement au prix de revient des accumulateurs de courant, appelé à baisser au cours des prochaines années. Car il n’est pas certain que l’autonomie des hybrides rechargeables augmentera en proportion. C’est plutôt la révision des règles de calcul de la consommation officielle qui pourrait inciter les constructeurs à augmenter la capacité de la batterie.

Ces règles rassemblées sous le protocole NEDC font que, pour l’heure, augmenter l’autonomie électrique ne se traduit pas par une diminution sensible de la consommation de carburant. L’hypothétique augmentation du bonus ne suffirait pas à compenser le surcoût à l’achat.

 

Pourquoi les hybrides sont presque toutes à essence, rarement au Diesel

Il y a des raisons très pragmatiques à la prépondérance du moteur à essence chez les véhicules hybrides.

Ainsi que nous le rappelions en début d’article, les constructeurs japonais furent les pionniers de la double motorisation. Or, la réglementation en vigueur dans l’Archipel (fiscalité et normes de pollution) a longtemps cantonné le Diesel aux véhicules utilitaires lourds. Même les fourgons légers carburent là-bas au super, lorsque plus de 99 % d’entre eux en Europe fonctionnent au gazole.

Mais les choses changent. Les progrès en matière de dépollution et de filtration permettent aujourd’hui au Diesel moderne de respecter les normes japonaises drastiques. En France où le Diesel est dorénavant pointé du doigt, on peine à croire que les autorités japonaises favorisent aujourd’hui la diffusion de ce moteur qu’ils rangent parmi les plus « propres », aux côtés des hybrides essence-électrique.

Après le Japon, les premières hybrides se destinaient principalement aux États-Unis, là où le Diesel est rarissime sur les voitures de tourisme. Là-bas, les hybrides frappèrent les esprits par leur sobriété. Mais en Europe où le Diesel est omniprésent, le consommateur a pu constater qu’une berline familiale Diesel brûle à peine plus de gazole que l’hybride ne consomme de super. Surtout, s’il reconnaît que l’hybride est plus sobre en ville, là où les arrêts se multiplient, il constate sur route ouverte que l’avantage va au Diesel. Plus d’explications à ce propos dans l’article intitulé : « Hybrides : quels avantages pour quels usages ? »

 

Pourquoi Peugeot et Citroën renoncent à l’hybride Diesel

Au milieu des années 2000, le constructeur français PSA Peugeot Citroën eut l’idée de capitaliser sur son savoir-faire de diéséliste et de combiner les moteurs électrique et Diesel. La logique semblait imparable : quitte à viser la consommation la plus faible, autant partir du Diesel qui boit moins par nature. En effet, du fait de son rendement thermique supérieur, le Diesel consomme en moyenne 1,5 litre de carburant de moins que le moteur essence, à puissance comparable et à distance égale. Cet écart se retrouve lorsqu’on compare une hybride Diesel-électrique à une essence-électrique.

Toutefois dans les faits, certains arguments diminuent l’intérêt de la double motorisation Diesel-électrique.

Pour commencer, ce type d’hybridation est de loin le plus coûteux, étant donné qu’un moteur Diesel dépollué est plus cher à produire qu’un moteur à essence de la même génération. Notons toutefois que cette différence est appelée à sérieusement s’amenuiser lorsque les moteurs à essence à injection directe seront tenus de s’équiper à leur tour d’un filtre pour respecter le taux maximal d’émission de particules fines (2017).

Le moteur Diesel est généralement plus encombrant (du fait de ses systèmes de dépollution) et plus lourd que l’essence de puissance comparable. Ce qui alourdit encore une auto hybride déjà grevée de la masse de sa batterie. Le Diesel est aussi plus bruyant et, surtout, moins discret lorsqu’il démarre (bruit et vibrations). Ses systèmes de dépollution n’apprécient guère les arrêts et démarrages incessants. Enfin, le Diesel gagne moins à s’assurer l’assistance d’un moteur électrique que le moteur à essence, moins vigoureux par nature à bas régimes.

Gageons toutefois que si les marchés principaux de Toyota et de Honda avaient été historiquement friands de gazole, l’hybridation Diesel-électrique se serait imposée (lire plus haut).

 

La voiture hybride est-elle plus écologique ?

Tenter de répondre à cette question équivaut à ouvrir la boîte de Pandore. D’innombrables études se contredisent entre elles, de sorte qu’il est difficile de dire si les avantages de l’hybridation dépassent ses inconvénients.

Car elle en a. Si la voiture hybride rechargeable n’émet pas de polluant direct lorsqu’elle circule en mode tout-électrique, le reste du temps elle consomme davantage d’essence qu’une hybride simple, du fait de la masse de sa batterie élargie. Par ailleurs, on estime généralement que la fabrication d’une voiture hybride consomme davantage de ressources qu’une voiture ordinaire.

Bien évidemment, ce calcul est rendu complexe et très délicat dès lors qu’une usine produit une part de l’énergie qu’elle consomme (toiture solaire, éolienne) ou qu’elle fait appel à une énergie renouvelable. Ce calcul dit « du puits à la roue » doit prendre en compte l’énergie consommée durant la production des batteries (l’exploitation du lithium n’est pas anodine) comme durant leur recyclage. Un casse-tête.